Pick-up sticks 6 – Rue Paré – Hypodrome Bleue Bonnets
Traversant la 15
Longeant la rue Paré
Hippodrome BLUE BONNETS
Relents d’odeur de cheval
Sur la piste aucun animal
Un homme s’avance en boitant
Pendant que tu suis une route asphaltée
Un après-midi de novembre
Au-delà de la rue Paré
Tombeaux l’un par-dessus l’autre coupant la marche
Boîtes rectangulaires
Canadian Pacific freight systems
Wagons immobiles
« Te retournant sur le chemin tu vois les lignes luirent «
Tu arpentes cette route singulière
Recherchant quelques indices du passage du temps
Derrière toi la montagne l’Oratoire St-Joseph Westmont
Devant la montagne ces tombereaux
Tu t’arrêtes pour prendre sur une voie brisée ce clou signé d’un H
Les wagons grincent reculent au bout de deux locomotives
Et toi
Tu les regarde passer
Les roseaux s’agitent au vent
Dressés contre le soleil de l’ouest
Au dessus de la glace friable
Dans l’odeur indissoluble des usines de plastique
ZERO sur un wagon
Roule marqué par une main inconnue
Toi
Tu passes sous les voies
Pendant que près de l’Hyppodrome un homme en haillons
Tout son temps épuisé
Traverse la trake
Marchant vers CASINO CHEVAUX PARI
Passant près du monticule des crottins des chevaux
BLUE BONNETS
Bandes oranges bandes blanches
ESTRADES POPULAIRES
Au tournant de la piste
La clôture laisse voir le temps de la course
Des chevaux montés colorés
Dans l’horizon
Tu cherches l’effraction
Près des wagons Anydric acid
« Oui les couleurs peuvent dilapider en vous le don du jour »
L’horizon s’élargit après une affiche Faite confiance à la croix Bayer
Retrouveras-tu intact ce que l’on t’a donné
Qui s’appelle une âme ?
Est-ce une ruine ou un paysage?
Sur le sol des traverses de bois arrachés
Tu te penches
Les clous d’acier
Forgés aux Shops Angus
Rouillés et courbés parce qu’arrachés violemment
Sur leurs tête les marques des pieux
Qui les ont enfoncés dans les traverses de bois
Un coup
Deux coups
Trois coups
Les chevaux partent au trot
Ils suent
En cadence
Battement sur le sol
Vibrant
Et les clous s’enfoncent brûlants dans les traverses de bois
Les lignes luisent lorsque tu te retournes
Venues de l’ouest conduisant le soleil couchant
Le rail te ramène vers la piste
Là une haute tour au dessus de laquelle
Dans une cabane de bois quelque anachorète
Compte les tours de piste
Et fait le pari de sa mort
Dans le hurlement de la course
L’astre coule lentement
Souffle un vent frais chargé d’odeurs plastiques
« Les roseaux ne ressentent rien lorsqu’ils plient »
Les coups s’accordent au temps décédé
En haillons l’homme qui passait contemple ce qu’il reste de lui après la course
Oui les corps sont épuisés de tout ce travail impossible !
Tu soulèves ce clou et poses sa pointe sur ta paume
Il a traversé la trake
Il est passé près de la tour de bois
Et s’est dirigé affamé vers le PARI VIDEO
Son nombre est vide
Épuisés dix chevaux suent dans sa main
A-t-il perdu comme toi son âme évidée?
Trois lumières rouges s’allument quand le train passe
Ceux qui voulaient traverser la trake s’arrêtent au dessus de Décarie passé la rue Paré
Travailleurs d’usine à 4 heures
Les lumières s’allument sur la trake et sur la piste, rouges et vertes
Il retourne dans sa nuit
Vers l’ouest le soleil couchant toujours tombe
Saluant les morts et les vivants
« À cet endroit les rails sont surélevés »
Des phragmites poussent dans les ravins inondés
On enlève les rails inutiles
Des tours pour surveiller et contrôler les mouvements des machines
S’ouvre Montréal sur son horizon
Le temps chuinte par une série de tuyeaux
Vapeurs sifflantes Tapis Amstrong
Tombeau Pieces
La locomotive tinte sa cloche
Devant lui des travailleurs s’avancent
Dans les odeurs de cambouis
Et passent par les conduits du temps
Traversant chaque jour l’aurore vers l’ouest
Un vent souffle dans cet espace dégagé et caché
Un homme sur cette route qui mène au couchant
Un clou dans la main
Au rythme de sa course
Le souffle de ses poumons
Le pari de sa vie.
25-11-98